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Soit dit en passant

C’est affaire de détermination

18 Janvier 2018 , Rédigé par jcd

Lorsque l’ennui menace d’occuper toute la place disponible dans leur pauvre vie, certains s’avachissent dans un fauteuil et regardent la télévision, n’importe quoi puisqu’il s’agit prioritairement de penser à autre chose ou même de ne penser à rien du tout. D’autres lisent, éventuellement n’importe quoi également ou s’en vont marcher dans la forêt (encore faut-il avoir cet article à proximité de l’endroit où l’on a choisi – ou non – de finir ses jours), dans la colline ou dans la rue la plus proche au risque de ne rencontrer personne à qui confier son désarroi ou son affligeante mélancolie, car la mélancolie de l’autre peut s’avérer affligeante pour peu que l’on n’ait soi-même nul goût pour cette maladie et, a fortiori, pas le moindre penchant pour le suicide. La commisération des uns vise le plus souvent à dissimuler une curiosité malsaine voire dégoûtante dont l’autre, le digne affligé saura se méfier dans son propre intérêt. D’aucuns, s’ils disposent d’un cinéma permanent dans leur environnement immédiat, iront voir n’importe quel film quitte à regretter plus ou moins amèrement une telle initiative quand la mer, la tour Eiffel, le mont Gerbier de Jonc où la Loire prend sa source, ou encore le musée des Arts et traditions populaires sont à deux pas, si l’on est toutefois précisément dans les environs, étant entendu qu’il ne s’agit en aucun cas de se défiler en prenant pour excuse, quelque peu fallacieuse, de devoir acheter un billet d’avion ou de train ou d’autobus, voire d’autocar sans préjuger pour autant de l’absolue nécessité d’acquérir un véhicule, automobile par exemple, équipé de toutes les options possibles et imaginables, encore qu’il faille peut-être s’interroger alors sur l’absolue nécessité d’un semblable investissement quand la tour Eiffel justement est à deux rues après avoir tourné à gauche juste avant le marchand de journaux. On en a vu décider catégoriquement d’aller visiter un voisin ou un cousin pas nécessairement éloigné occupé à mourir d’un cancer généralisé dans un hôpital dont l’ambiance peut quelquefois paraître rédhibitoire ou, tout au contraire, salvatrice pour le désespéré soudain tout heureux de vérifier ce à quoi il vient d’échapper. Car l’ennui n’engendre pas systématiquement le désir insurmontable d’en finir une bonne fois avec une existence à laquelle il n’est pas interdit de trouver un certain charme au moment exact où l’on s’apprêtait à s’en séparer pour cause d’inappétence probablement temporaire. Et ce ne sont certainement pas les compagnons têtus de la Vaine Espérance chers à André Hardellet qui soutiendraient le contraire. D’autres encore écrivent un joli petit poème sur le coin d’une table où demeurent les restes de spaghettis bolognaise sans même prendre le temps de se persuader qu’ils vont ainsi révolutionner toute la poésie contemporaine. De plus humbles sont même capables de s’en venir partager la couche d’une dame complaisante, prêts à croire durant un court instant qu’on ne les aime pas pour l’argent qu’ils laisseront sur la table de nuit avant de sortir dans la bruine glacée qui tombe sans discontinuer, donnant au quartier ce cachet particulier que quelques pervers vont chercher jusqu’à Hambourg. Enfin, d’épouvantables optimistes entreprendront de se confier à quelque(s) bouteille(s) remplie(s) d’un liquide plus ou moins alcoolisé qui ne leur procurera qu’un enthousiasme plus ou moins momentané. Le plus ou moins est l’unité de mesure, assez imprécise j’en conviens, utilisée par d’incorrigibles relativistes dont on peine à croire qu’ils pussent encore, après tant d’années, s’imaginer que l’ascenseur va redescendre alors qu’il est bloqué au vingtième étage en raison d’une interruption de la fourniture d’électricité décidée unilatéralement par l’intersyndicale réclamant depuis deux mois déjà une revalorisation du salaire des intérimaires venus des départements d’outre-mer au moment précis où la cour internationale des Droits de l’homme réunie à Bratislava  vient tout juste de se prononcer en faveur de la suppression du paiement des jours fériés aux salariés du ministère de la Culture. On voit ici combien tout se tient, quand bien même il ne saurait être question de revenir sur les accords de Grenelle négociés sous Pompidou.
Or, étant donné que mon appartement est au dix-neuvième dans le vingtième, que le métro est en grève et que je suis présentement au croisement de la départementale 990 et de la nationale 145 à quelques kilomètres de Chénérailles au beau milieu de la Creuse et qu’il me faudrait trouver rapidement un hôtel ou dormir, je m’interroge quant à l’opportunité qu’il pourrait y avoir à chercher et trouver si possible un deux pièces cuisine en rez-de-chaussée à deux pas du boulot, du côté de l’avenue Kléber. Certes, cela ne résoudrait nullement mon problème actuel et même immédiat mais puisqu’il est admis que le mieux est l’ennemi du bien je préfère demeurer modeste  et m’en tenir à mes acquis sociaux. Tant qu’on a la santé, hein !


18 janvier 2018

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