Tout doit disparaître !
Il est plus que temps d’en finir. Certes, c’est admettre qu’ils ont gagné et que ce seront eux, et eux seuls, qui se partageront les restes du gâteau, en se foutant néanmoins sur la gueule pour en avoir la plus grosse part. L’heure de l’hallali a sonné. Oh ! je sais, vous me rétorquerez que ce ne sont là qu’affirmations sans fondement, éclairant une vision ultra pessimiste indigne d’un individu prétendument responsable, censé s’appuyer sur des faits avérés et soucieux de la survie des générations futures. Eh bien justement, parlons-en !
Chaque année, l’activité humaine consomme davantage de ressources naturelles que la planète ne peut en reconstituer sur la même période. Ce qui signifie en clair que nous vivons à crédit tout en sachant que non seulement nous ne rembourserons jamais mais que le capital s’épuise à un rythme chaque jour plus important et qu’au final il n’y aura plus rien à prélever. Alors même que la population globale sera passée de un à six milliards (salauds et imbéciles confondus) en moins de cent ans et que nous étions déjà sept milliards (plus ou moins dans la même proportion) en 2011. Le nombre d’individus à nourrir ne cesse d’augmenter quand, dans le même temps, les ressources s’épuisent, sachons en tirer les conclusions qui s’imposent.
Oui, mais comparons ce qui est comparable, objecteront les sages avec sur le nez leurs lunettes à foyers multiples, et continuons d’investir dans le progrès afin que nos chers scientifiques inventent et perfectionnent les nourritures de demain en partenariat avec le lobby de l’agro-alimentaire mondialisé. Et ne nous laissons pas déstabiliser par un défaitisme de mauvais aloi. Toutes les épidémies ne sont pas vaincues et on peut en inventer de nouvelles, sans compter que les guerres déclenchées aux endroits propices et les accidents nucléaires ou bactériologiques peuvent contribuer efficacement, nous l’avons déjà prouvé, à un rééquilibrage des populations tenant compte des besoins et des excédents locaux sans qu’il soit nécessaire d’inquiéter inutilement nos élites pensantes.
Certes certes, mais il ne s’agit pas que de nourrir comme on gave le cochon ou l’oie, il convient aussi de construire et faire fonctionner tout un matériel consommateur de matières premières dont, là encore, les ressources ne sont pas inépuisables. Vous me répondrez que ce qui est pris est pris et que le jour où il n’y en aura plus, eh ben mon vieux, on trouvera autre chose, ce à quoi j’ajouterai de mon côté qu’il faut s’attendre à un branle-bas économique lorsque les États-Unis auront perdu leur suprématie monétaire, ce qui ne saurait tarder puisque le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud s’y emploient. L’hégémonie du dollar c’est celle des États-Unis. La bulle va éclater. Le dollar va s’effondrer et les États-Unis avec. […] À système constant, il faudrait que les États-Unis acceptent de s’infliger les sacrifices qu’ils demandent d’habitude aux autres par le biais du FMI et de la Banque mondiale. Cela ne se fera jamais. La catastrophe est donc inéluctable.
Néanmoins, car il y a toujours un néanmoins quelque part, les États-Unis n’ont pas l’intention de se laisser dépouiller de leur suprématie par des semi-négros sans réagir car l’argument de poids américain se nomme sa puissance militaire. Forte d’une capacité impressionnante en hommes et en armements, l’Amérique du Nord est présente à peu près partout dans le monde et son industrie dans ce secteur contribue à sa puissance économique. D’où l’exigence du pouvoir politique à désigner le ou les ennemis du moment qui menaceraient ladite hégémonie du dollar, entraînant pour partenaires plus ou moins volontaires des gouvernements, notamment européens, aujourd’hui presque tous inféodés à la doctrine impérialiste. La monnaie européenne représentait jusqu’ici un contre-pouvoir dont il était nécessaire et urgent pour les États-Unis de combattre le développement, par exemple en tentant d’imposer le fameux Grand Marché Transatlantique, avec l’assentiment de l’Union européenne, ce qui est quand même un comble et démontre, une fois encore, la complicité de celle-ci avec les grandes banques américaines.
On peut sans honte sourire de la relative efficacité de l’ONU, mais c’est encore trop de temps de parole accordé à des représentants de nations qui comptent plus ou moins pour du beurre. Voilà pourquoi ont été inventées et mises en place des sortes d’instances essentiellement dédiées à la gestion économique du monde : les inénarrables G8 et G20. La vérité toute crue est la suivante : 8 commandent à 20, 20 commandent aux 175 autres nations ainsi proclamées subalternes.
Conclusion : il est plus que temps d’en finir. L’auteur, à qui j’ai emprunté ces quelques lignes citées en italiques est convaincu qu’il est aujourd’hui encore possible de remettre de l’ordre dans la manière dont fonctionne la démocratie, ici en France mais également partout dans le monde puisque nul ne peut désormais ignorer que le fameux battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut provoquer une tornade au Texas. Nous pouvons donc tenter d’imaginer quelle serait la réaction des États-Unis s’ils apprenaient, demain ou après-demain, que dorénavant et jusqu’à preuve du contraire ce n’est pas le plus costaud qui gagne à tous les coups. Dès lors que je dégaine et tire le premier.
Je vous avais prévenus !
Jean-Luc Mélenchon. L’ère du peuple. Pluriel éditeur.
octobre 2016